Questionnaire diptyque : Olivia Giacobetti

03.09.2015
Olivia Giacobetti

Olivia Giacobetti

Le questionnaire diptyque a été composé sur le patron de celui que Proust a rendu célèbre par ses réponses. De ces trente-quatre questions destinées à faire connaître une personne qui est chère à diptyque, celle-ci n’est tenue de répondre qu’à celles qui lui plaisent.

Olivia Giacobetti est une auteure de parfum. Elle découvre sa vocation à l’âge de dix ans, grâce au film de Jean-Paul Rappeneau « Le Sauvage » dans lequel Yves Montand est parfumeur. L’amour des odeurs l’attache aux matières premières, à la réalité du monde plutôt qu’à l’abstraction des modes. Son apprentissage lui donne le goût de la narration olfactive. Ses choix d’indépendance professionnelle lui ont permis une liberté de recherche dans ses créations de parfums.

 

3. Votre met favori
Un tagine aux abricots.

4. Votre senteur préférée
Une seule ?
Le bois car il y en a mille ! Blond, noir, sec, lacté, brûlé ou mouillé, j’ai du mal à imaginer un parfum sans bois, il est présent dans mon travail comme un fond pour un peintre.

5. Votre madeleine de Proust
J’en ai beaucoup, le solfège d’un parfumeur est une succession de souvenirs, d’émotions retrouvées. La plus intime est sans doute l’odeur de l’ours de mon enfance, il me suffit d’y penser pour retrouver la sieste et son odeur rassurante, un mélange de paille et de laine bouillie.

7. L’animal le plus émouvant pour vous?
Un âne

8. Synesthésie : avez-vous des associations sensorielles de forme, couleur, parfum, et son ?
Mon métier repose sur le jeu des associations, sur l’illusion de la perception, les sensations se mêlent, se fondent… Chez moi, l’odeur entraîne dans sa représentation tous les autres sens.

9. Quelle est la qualité que vous possédez qui vous a fait du tort ?
La curiosité.

10. Et quel serait votre défaut auquel vous seriez le plus redevable ?
Ma curiosité.

14. Le roman qui vous a ouvert le monde comme un livre, qui vous a augmenté ?
Lettres a un jeune poète de Rainer Maria Rilke, j’avais 16 ans.

16. Trois films primordiaux
Le film de mon enfance, Le sauvage de Jean-Paul Rappeneau car il est à l’origine de mon envie de devenir parfumeur.
Le temps des gitans d’Emir Kusturica
La leçon de piano de Jane Campion

18. Quel sculpteur, sculpture, choisirez-vous pour votre musée imaginaire ?
Une folie, the Wether project, le soleil d’Olafur Eliasson.

20. Quels personnages, passés ou présents, réels ou fictionnels, vous inspirent-ils ?
C’est plus abstrait, c’est souvent un détail qui retient mon attention, un charme, un décalage, une sensation qui va provoquer autre chose et être à l’origine d’une nouvelle envie, d’une nouvelle idée.
Je m’intéresse aussi beaucoup au travail de certains artistes, comme Anish Kapoor ou Yoshioka Tokujin, j’y trouve une magie, une extraordinaire poésie qui est une grande source d’inspiration.

22. Si vous pouviez offrir un bouquet de fleurs à un oiseau : quelles fleurs ?
Un bouquet de fleurs de menthe et de cosmos chocolat au parfum de chocolat !
Pour quel oiseau ? Un cardinal rouge.

24. Quel est votre paysage d’évasion ?
L’eau à perte de vue.

26. Avez-vous une maxime dans votre métier, qui vous serve de boussole et de lanterne ?
J’aime beaucoup cette phrase d’Andrée Putman que j’ai eu la chance de rencontrer. « Ne pas oser c’est déjà perdre. Réjouissons-nous de tout projet ambitieux, voire utopique, car les choses ne bougent que si l’on rêve ».

27. L’acte de création régit-il votre vie ?
Cela devient une chose essentielle, chercher, c’est un sentiment d’inconnu, de mystère, comme un besoin d’aller vers ce qui m’est encore étranger.
Picasso disait,  » qu’est-ce que je fais si je n’ai pas d’inspiration? Je travaille ! ».

28. Le cadeau, le partage, la belle expression « faire présent de… » : qu’aimez-vous offrir ?
Du temps…

29. Si vous deviez parler de votre métier à de très jeunes talents pour les inciter à l’embrasser ?
Je donnerais seulement un conseil…
A trop copier les autres, on oublie son propre monde, on tue son instinct et son imaginaire.

31. En mettant les problématiques économiques ou de statut social de côté un instant, en quoi des productions rares de noble qualité (savoir-faire, finition, recherche etc.) peuvent être bienfaisantes aujourd’hui, selon vous ?

La France possède un véritable trésor mais le savoir-faire s’est perdu dans une standardisation régit par le marketing et le désir de plaire au plus grand nombre. Aujourd’hui, la planète s’habille et se parfume presque de manière uniforme, c’est effrayant ! L’artisanat, les productions rares, les petites mains, me semblent être le seul avenir du luxe face à un marché fatigué par des marques standardisées et mondialisées. On observe déjà un besoin de plus de vérité…

33. Et quel serait votre parfum diptyque favori (Eaux ou bougies) ?
L’eau Trois.

34. Pour vous, diptyque en quelques mots ?
Avoir créé son propre monde en dehors des modes.