La photographe Winnie Denker a scruté la tour Eiffel mieux que personne. L’écrivain Françoise Sagan détestait l’édifice de fer jusqu’à ce que ses clichés la lui révèlent… Elle préfaça alors l’ouvrage de l’artiste dédié à la tour, lui donnant son titre : « la sentinelle de Paris ».

Lors du centenaire de la tour Eiffel en 1986, l’éclairage fut confié à Pierre Bidault, ami du photographe, qui s’éprend alors de cette flèche de ferronnerie, symbole de Paris. Winnie Denker y consacre une décennie et lui dédie trois livres. Guettant son réveil à l’aurore, dormant à son sommet, obtenant tous les passe-droits possibles pour inventer des angles de vue inédits, de la salle des machines aux belvédères interdits au public. C’est une obsession. Ses photos magnifient l’équilibre de cet ouvrage dont le squelette visible fascine à raison le monde entier. Ces photos seraient impossibles aujourd’hui, dû à des aménagements de sécurité.

Spécialiste de la chambre photographique au format 20/25 qui requiert beaucoup de technique et de préparation, Winnie Denker s’était consacrée à la photo de joaillerie, de mode et aux documentaires, traversant les Etats-Unis pour le Life Magazine, avant de s’attaquer à la Tour Eiffel. Suite à ce travail, la photographe est mandatée par l’Unesco pour témoigner de l’héritage de l’Humanité : Istanbul, la Turquie, la vallée de l’Euphrate, Alep, Damas et particulièrement Palmyre, en Syrie, l’Egypte, la Muraille de Chine… Autre commande de l’Unesco, une grande série consacrée au musée de l’Ermitage de Saint-Pétersbourg, où des tirages en platine de ses photographies y sont exposés.

Eclairage des pyramides d’Egypte en pleine nuit, toits verglacés de l’Ermitage par moins 40°, hélicoptère, grue branlante au vent, la photographe est renommée pour ses prises de risques – et pour sa convaincante sympathie qui ouvre toutes les portes. Sa dernière passion est l’Islande. Née avant-guerre au Danemark et vivant en France depuis toujours, elle continue de sillonner la planète avec son grand appareil à chambre.