La palme des palmes

13.05.2016
Affiche de Jean-Gabriel Domergue

Affiche de Jean-Gabriel Domergue

Les prix du palmarès du Festival de Cannes furent dès l’origine investis d’une fonction emblématique : celle de récompenser l’art selon des critères artistiques contre toute procuration patriotique. Aussi le symbole du prix importait. Pourtant la palme mit longtemps à s’imposer.

L’origine du Festival de Cannes fut l’intention d’instituer une joute cinématographique « d’objectivité artistique et d’impartialité absolue » contre la machine de guerre propagandiste que devenait la Mostra de Venise sous la férule fasciste, culminant avec l’intervention personnelle d’Hitler dans le palmarès de 1938. A l’issue de tractations internationales et de préparatifs précipités, l’ouverture devait éblouir le monde le 1er septembre 1939. Mais à cette date funeste, le Reich nazi envahit la Pologne et la déflagration mondiale devait reporter la première occurrence du festival à 1946. Pour hommage, l’initiateur du festival fut Philippe Erlanger diplomate, alors pleinement soutenu par Jean Zay, ministre de l’Education Nationale, plus tard abattu par la milice vichyssoise en 1944, et dont la République française a transféré les cendres à son Panthéon des grands hommes – et femmes – en 2015.

En août 1939, le public avait pu admirer à l’Hôtel d’Eden Roc la broche et le porte-cigarette en or massif destinés à couronner les célébrités féminine et masculine figurant dans le meilleur film, auquel serait remis le « Grand prix du Festival International du Film. » Ce grand prix couronna le film gagnant à l’issue du vote du jury de 1946 à 1954.  La palme d’or apparut en 1955 et fut remise durant 9 ans. Mais, faisant l’objet de dissensions entre les organisateurs, elle disparut des trophées du festival cannois de 1964 à 1975, année de sa réhabilitation. Ça n’est pourtant que cinq ans plus tard que le terme de Palme d’or s’imposa à tous et jusqu’à nos jours, vraisemblablement pour toujours.

C’est Robert Favre Le Bret qui initia l’idée d’une palme pour couronner le gagnant à l’issue du vote du jury. Le mérite de cette feuille est de rassembler deux symboles : celui de la victoire qui remonte à l’Antiquité et celui de la ville de Cannes, présent sur les armoiries des familles ancestrales de la cité, dont les palmiers de son boulevard La Croisette perpétuent l’actualité.

Ce fut au tour des joailliers de concourir. La proposition de Lucienne Lazon fut retenue. La palme reposait sur un socle en terre cuite. En 1975, elle était présentée dans un écrin de maroquin rouge pleine peau, capitonné de daim blanc. Son socle pyramidal apparut une décennie plus tard. En 1992, Thierry de Bourqueney proposait une pyramide de cristal. Depuis 1997, c’est la Maison de joaillerie suisse Chopard qui a l’exclusivité de sa fabrication. La palme pèse 118 grammes d’un or jaune à 18 carats. De 13.5 centimètres sur 9 avec 19 folioles sculptées, la palme est fixée sur un coussin de cristal. Le trophée se présente dans un écrin de maroquin bleu. Les palmes en attente de leurs héros, si deux ex-aequo étaient primés, sont conservées dans le coffre du joailler.

Les symboles traversant les temps, la palme demeure en usage pour certains prix universitaires. Mais celle d’or est devenue un mythe à elle seule.

 

diptyque est un partenaire officiel du Festival de Cannes.