MOTIFS, dans les coulisses de la Design Library

21.10.2016
Abstract: Hand-painted paper, late 20th century, Studio Tucano, Italy. Courtesy / © Documentary Designs, Inc. d/b/a The Design Library (page 47)

Abstract: Hand-painted paper, late 20th century, Studio Tucano, Italy. Courtesy / © Documentary Designs, Inc. d/b/a The Design Library (page 47)

Les motifs sont partout. Sur feuilles et écorces. Sur pelages de fauves et coquilles d’insectes. Leur logique les démultiplie. Ils recouvrent les tissus, grimpent aux rideaux, grouillent sur les robes, pâturent sur les tapis. Et ils ont beau être antiques, ils sont la sensation de la saison…

Les éditions Phaidon leur consacrent un ouvrage d’importance : MOTIFS, dans les coulisses de la Design Library.
Le grand patron des motifs est donc la Nature, et l’Humanité a une tendance culturelle à systématiser. Peut-être la rencontre de ces deux traits est-elle à l’origine du motif textile, présent de tout temps, sur chaque continent, dans toutes les cultures, et toujours éternellement actuel dans la mode. Car le motif ne se répète pas seulement, il change : il se copie, se transforme, se modifie, s’adapte, se rajeunit, il influence, et toujours son schéma logique, rythmique et chromatique exprime une idée, une émotion, une intention, une représentation, un ordre ou un chaos, une époque et jusqu’à une position sociale. Il semble donc aussi circonscrit dans son dessin qu’infini dans les variations de ses répliques.
Or il existe un lieu qui collectionne les motifs de l’histoire de l’humanité, et dont les archives répertoriées et classées sont disponibles et proposées aux créateurs pour leur inspiration (designers et graphistes, dans le textile, l’ameublement, les revêtements, les imprimeries de papier, les vêtements…) : c’est la Design Library, fondée en 1972 par Susan et Herb Meller, puis reprise depuis 2002 par Peter Koepke, longtemps collaborateur des fondateurs. Depuis sa création, les archives de la Design Library n’ont cessé de s’étoffer des textiles de toutes les cultures et époques. C’est un musée vivant dont le livre des éditions Phaidon donne un immense et magnifique aperçu, pourtant limité compte tenu de leur réserve unique de plusieurs millions de motifs originaux.

Le motif et ses techniques de reproduction se sont réciproquement conditionnés. Le dessin du motif fut un temps contraint par ses possibilités de réplication et de coloration, surtout dans l’industrie textile. L’idée du motif a partie liée avec sa réalisation, tant dans son abstraction géométrique (pour permettre la génération de l’un au multiple) que dans son mode de production (support, tracé, coloration, taille, etc.)

La phrase en exergue du livre est donnée à William Morris, artiste historique du motif : « Aucun motif ne devrait être dépourvu de signification ». Probablement est-ce avec cette idée en tête que la fondatrice de la Design Library et ses successeurs ont inventé une méthode d’ordonnancement des motifs collectés, en quatre familles (floral, géométrique, ethnique et courant) qui se ramifient en plus de 1200 catégories de genre et d’espèce, inspirées selon la classification biologique (époque, mouvement artistique, technique, type et aspect du tissu, thème…) MOTIFS se divise ainsi en autant de chapitres que de types de motifs tous abondamment illustrés d’une sélection exceptionnelle. Enfin de grands créateurs présentent les fruits de leur échange avec la Design Library, envers qui leur dette se transforme en apport, les nouveaux motifs inventés venant enrichir son fonds d’archivage

Le motif est si commun par sa présence sur tant de supports, mais à la fois si technique et associé à des problématiques historiques, sociales et industrielles qu’il est aussi visible qu’inconnu – à l’exception des professionnels. Aussi cet ouvrage aux reproductions de très haute qualité en permet une approche riche et complète.

Nota Bene : Le motif est très cher à l’histoire de diptyque. Ses fondateurs admiraient William Morris, les premières créations de diptyque furent des tissus aux motifs dessinés par deux de ses trois fondateurs, Desmond-Knox Leet et Christiane Montadre-Gautrot. Quelques années plus tard, cette dernière dessinerait de complexes motifs de Zelliges, dont les décors du pavillon du Maroc lors de l’Exposition internationale de Séville en 1992 ainsi que certains panneaux de la Grande Mosquée Hassan II de Casablanca.

Tags: