Mesostics

22.08.2016
John Cage - mesostics

John Cage - mesostics

John Cage et les Mesostics, par Jean-Yves Bosseur

Il est certaines personnalités que l’on rencontre pratiquement tout au long de l’activité créatrice de John Cage : Duchamp, Thoreau, Joyce, Satie, selon des modalités diverses (textes, œuvres poétiques, graphiques, partitions). En 1981, Cage publie une première version de « James Joyce, Marcel Duchamp. Erik Satie : An Alphabet » selon la technique des Mesostics. Alors que, dans l’acrostiche, le nom du dédicataire est inscrit verticalement au début d’un poème, dans le cas du mesostic, le nom se lit au milieu (du grec mesos), une des règles étant de ne pas faire réapparaître une lettre imprimée en majuscule dans l’espace qui la sépare de la précédente. C’est l’écrivain et philosophe américain Norman O.Brown qui suggéra à Cage le recours à cette méthode poétique. Chez lui, il est des éléments qui paraissent rebondir d’une œuvre à une autre, traduits selon des modalités de communication différentes. C’est le cas de la lettre, si importante dans sa démarche artistique qu’elle a donné naissance à une poétique à part entière en s’émancipant des règles de la syntaxe et du discours linéaire. Ainsi, n’étant pas basée sur des principes de possession ou de pouvoir, la poésie ne devrait pas, selon lui, viser à délivrer un quelconque message. Il s’agirait plutôt d’ « élaborer un langage qui ne gouverne pas les individus mais stimule l’imagination, un langage anarchique ». Certains « Mesostics » sont destinés à une lecture intérieure; d’autres peuvent devenir le prétexte à une activité vocale, tels les Sixty-Two Mesostics re Merce Cunningham (1971) qui, dans le livre M, sont publiés sous forme de textes, sans les prescriptions musicales. À partir des principes du mesostic, Cage a réalisé successivement cinq « réécritures » à travers Finnegans Wake de Joyce que l’on peut notamment entendre dans son œuvre radiophonique Roaratorio (1979).

 

Jean-Yves Bosseur est compositeur et musicologue.