Méandres de l’ambre (suite)

23.02.2015
ambre-close-up

Parce que cette pierre projette des reflets magnifiques, flotte, brûle en dégageant de suaves arômes et renferme parfois des animaux, parce qu’elle a des propriétés électrostatiques, parce qu’on lui prête aussi des vertus médicinales, parce qu’elle est légère et chaude au toucher, l’ambre fut toujours une matière précieuse et sacrée. Donc vénérée et convoitée. Il était l’or rouge pour les Germains. Elément alchimique en Egypte. Dédié au culte de Zeus et d’Apollon en Grèce. Plus tard au Moyen Age les chevaliers Teutoniques en tinrent le monopole. Après l’Europe chrétienne, il essaima dans les terres d’Islam. Partout et toujours il était la matière révérée pour y tailler bijoux ou objets cultuels. Au XVIIIe siècle une chambre d’ambre fut construite par Frédéric-Guillaume 1er de Prusse puis offerte à l’empereur de Russie Pierre le Grand. Plus de 6 tonnes de lambris et de marqueterie d’ambre. Une gemme d’art aux reflets d’or alors estimée rien moins que la huitième merveille du monde. La chambre couva les amours de la grande Catherine de Russie, car des vertus aphrodisiaques étaient aussi prêtées à l’ambre. Volée par les Nazis, les traces de ce joyau de six tonnes se perdent à Königsberg en 1944. On dit la chambre brûlée mais on la recherche encore dans le fond de la mer Baltique, dans les sous-sols effondrés de Königsberg ou aux frontières de Saxe et de Bohème en Europe centrale…

D’après quelques rares documents photographiques en noir et blanc et un seul en couleur, une reconstitution de la chambre d’ambre est entreprise en 1976. Grâce aux talents de grands artisans et du plus bel ambre, elle est inaugurée en 2003 au palais impérial de Tsarkoïe Selo, là même où elle avait été volée.

Et tandis que les historiens s’invectivent, que les chasseurs d’ambres se jouent des mauvais tours, que les sectes divaguent et que les experts scientifiques cherchent à savoir comment identifier un ambre antique sans le casser, les faussaires se frottent les mains. L’ambre reste l’eldorado des cultes, des théories les plus folles et des contrefaçons les plus indécelables. Certes, mais il faut surtout retenir que tous ces remous mythologiques, historiques et scientifiques n’ont en rien altéré le caractère surnaturel de cette résine naturelle qu’est l’ambre : la lumière réfractée dans sa transparence mordorée semble émettre d’invisibles vérités…