L’aieul de l’oeil

02.11.2014
Georges Mélies - photo film 2

Dans le cadre de la FIAC 2014, diptyque est partenaire officiel de la deuxième édition de Private Choice, qui présente une collection d’art et de design dans un lieu choisi pour son histoire. Cette année, cette édition a investi la maison où est né Georges Mélies. Voilà l’occasion de rendre hommage à cet aïeul tutélaire du cinéma.

 Rien à faire, Georges, le petit dernier, ne reprendra jamais l’usine familiale de chaussures. Ses parents lui refusent l’Ecole des Beaux-Arts. Il sera élève du grand peintre symboliste Gustave Moreau. Envoyé en Angleterre à 18 ans il y apprend la magie. Tout petit il bidouillait tout le temps, dessinait et inventait des histoires. Le père des frères Lumières, les inventeurs du cinématographe, essaie de le dissuader : ce nouveau procédé n’a aucun avenir !

Il acquiert l’animatographe et invente un métier pour sa vocation : cinéaste. Il fera plus de 500 films. Pour les faire exister, il crée des nouveaux métiers : producteur, réalisateur, scénariste, décorateur, acteur, opérateur, directeur d’acteurs…

Il y a du mauvais temps ? Il invente en 1897 le premier studio de cinéma dans sa grande maison de Montreuil.

1902 : Le voyage sur la lune est le tout premier film de science-fiction.

C’est avant tout un artiste, un inventeur, une machine à idées. Un artiste du trucage. Rappelons qu’il avait fondé l’Académie de la Prestidigitation en 1891. Il joue avec les moyens techniques d’alors avec génie, inventant le fondu enchaîné, la surimpression, le gros plan, le ralenti, l’accéléré, l’usage des caches et des maquettes, l’arrêt sur image… Dessinateur, il peint lui-même les trompe-l’œil de ses décors et colorie ses pellicules à la main !

Il est le père du cinéma moderne. Le géant D. W. Griffith dira « je lui dois tout ». Pour Charlie Chaplin, c’est « l’alchimiste de la lumière »

Sa société de production créée en 1896 s’appelle Star Film : sans le savoir, il invente aussi un nouveau mot essentiel au cinéma.

Il sera copié et pillé. Artiste, il ne saura pas vraiment trouver de parade. Gaumont et Pathé sont des titans lointains contre lesquels sa société américaine dirigée par son frère ne peut rien. Ruiné, il détruit ses films. Beaucoup de ses pellicules deviendront des semelles de soldats pendant la 1ère guerre mondiale. Ou elles seront fondues pour en récupérer l’argent qui les compose.

Il vendra des bonbons… Par hasard, il sera redécouvert et célébré à la fin de sa vie, avec tous les honneurs mérités.

Ironie de l’histoire : c’est grâce aux copies piratées de ses œuvres, ou confisquées illégalement par des compagnies américaines peu scrupuleuses qu’une grande partie de son œuvre nous est accessible.

Martin Scorcèse lui rend hommage dans son film Hugo Cabret avec Ben Kingsley. Il représente ce génie comme se le rappelle sa petite-fille : « Il était si gentil, toujours de bonne humeur, toujours plein d’idées pour se distraire et distraire le monde. Sportif, dynamique, jeune d’allure, foncièrement honnête, très droit, toujours de bonne humeur, il restait dans l’adversité le même homme sage et philosophique. Il n’était pas désenchanté. Ce n’est pas étonnant qu’on découvre aujourd’hui la fraîcheur et l’enchantement de son œuvre, car il est resté très près de ses rêves et de la poésie de l’enfance. (…) Il était la joie de vivre, la malice au coin des yeux, une pirouette qui efface ce qui peut faire mal. »