La Nouvelle Vague

30.03.2018
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Naissance de la Nouvelle Vague, par Françoise Zamour

« Le film de demain m’apparaît comme plus personnel encore qu’un roman, individuel et autobiographique comme une confession ou comme un journal intime ». En écrivant ces mots, en 1957, François Truffaut résume l’espoir et l’ambition d’une génération de jeunes critiques impatients, avides de tourner leur premier film.

Rejetant le cinéma en vogue, émaillé de provocations faciles et de mots d’auteurs, ils lui opposent de nouvelles figures tutélaires : Renoir, Bresson, Cocteau, Rossellini. Par-dessus tout, ils vénèrent le cinéma américain. Les films d’Orson Welles, d’Hitchcock ou de Hawks, découverts à la Cinémathèque, commentés et analysés sous l’égide d’André Bazin, dans les pages des Cahiers du cinéma, leur inspirent la « politique des auteurs ». Ils l’affirment avec force : au cinéma, le véritable auteur est le metteur en scène. Son style révèle sa vision du monde, et transparaît d’un film à l’autre, comme une signature.

A l’image de ces maîtres, ils seront des auteurs.      

De 1958 à 1962, les films déferlent comme une vague. Le Beau Serge et Les Cousins de Chabrol, Les Quatre cents coups et Tirez sur le pianiste de Truffaut,  A Bout de souffle de Godard, Hiroshima mon amour de Resnais, Lola de Jacques Demy révèlent autant de visions du monde. Les films éblouissent comme des coups d’éclat, qui font entrer le cinéma français dans la modernité. Une nouvelle génération d’acteurs illumine les écrans : Jean-Claude Brialy, Jeanne Moreau, Jean-Paul Belmondo, Anna Karina imposent en quelques films leurs voix singulières, leur désinvolture insolente. Comme volés aux tables des cafés, ou aux conversations de rue, les dialogues, écrits parfois pendant le tournage, ou improvisés dans l’instant, bruissent de l’air du temps. La pellicule sensible, les nouvelles caméras légères, la prise de son directe permettent aux cinéastes de privilégier les décors naturels, de limiter les équipes et les budgets, de chercher un éclairage sans effets, de laisser le réel affleurer à chaque plan.

Le CNC s’inspire d’une couverture consacrée par l’Express à la jeunesse pour baptiser Nouvelle vague ce remplacement de génération. Pourtant, l’acte de naissance du mouvement pourrait se résumer à un plan. C’est le regard de Jean-Pierre Léaud, arrêté dans sa course vers la mer, qui, dans l’image finale des Quatre cents coups, bouleverse le spectateur et réinvente le cinéma.

 

Françoise Zamour, ancienne élève de l’École normale supérieure, Agrégée de lettres classiques et Docteur en études cinématographiques, est Directrice des Études de lettres à l’École normale supérieure.