Hespéries, Hespérides

16.07.2018
Gustave Moreau (1826-1898) - Hercule au jardin des Hespérides

Gustave Moreau (1826-1898) - Hercule au jardin des Hespérides

Filles de la Nuit, les Hespérides sont les nymphes du couchant. Belles et sages, leurs voix sont musicales et enchantent… Et ne savent-elles pas se dérober à tout regard par de subites métamorphoses ? Car combien sont-elles ? Qui est leur père ? Quel est ce jardin où elles séjournent ?

Au début était le Chaos, confusion primordiale éternelle. De cette informité est engendrée la Nuit, déesse des ténèbres. Avant que d’épouser son frère Erèbe, elle donne naissance à un cortège de fléaux qui sera le lot des mortels : Destin, Mort, Sommeil, Vieillesse, Concupiscence, Discorde, La Parque Noire, les Parques, ainsi que les Hespérides…
Ces sœurs tiennent leur nom de leur contrée, ces Hespéries, l’occident des grecs où le soleil s’efface, le lieu d’où l’empire du soir s’élève. Il représentait les limites du monde connu et son emplacement a donc varié au gré des récits et des avancées maritimes. Les Hespéries furent un pan d’Italie, puis des Syrtes en Lybie, d’Espagne ou de Mauritanie… A cette extrémité occidentale s’élève une immense éminence dont les sommets enneigés se confondent aux cieux et qui plonge ses pieds dans l’océan : le mont Atlas, à qui nous devons encore le nom d’océan atlantique. Puni, Atlas est un titan pétrifié par Jupiter ou Persée selon les récits. Il y vit avec son frère Vesper, nom à l’origine du mot vêpres et de l’adjectif vespéral, relatifs au soir.

En ce sombre lieu scintillent des pommes d’or dans un jardin fruitier. Ces fruits sont sacrés, car leur pouvoir magique représente de grands dangers. Ce jardin des Hespérides sera donc gardé. Ces sœurs nymphes furent ses premières gardiennes. Or ne voilà pas qu’elles cédèrent au larcin de quelques pommes ! Alors Héra, épouse de Zeus, reine du ciel et de l’Olympe, y dépêcha Ladon, un dragon à cent têtes aux yeux perpétuellement ouverts, chacune parlant une langue distincte, pour en assurer la garde, et d’abord pour empêcher ses résidentes de faire main basse sur ses fruits.

Ces sœurs n’étaient peut-être pas filles de la seule Nuit originelle. Quelque grand gaillard y aurait mis du sien… Qui donc? Probablement Atlas, propriétaire de ce jardin sur ses flancs. Les mythologues assurent que Zeus ou, Phorcys sont de possibles pères putatifs. Et combien d’Hespérides ? Le plus souvent trois : Aeglé, Erytheïa, Hespéris. A moins que ce ne soient Aeglé, Aréthuse et Hypéréthuse ? Ou qu’elles soient quatre, ou sept, ou onze ! Les bruits vont bon train.

Ce qui est assuré, c’est qu’Hercule, accomplissant le onzième de ses douze travaux, tua Ladon et s’empara des pommes d’or, en rusant Atlas. Inconsolables de la perte des fruits, les Hespérides en eurent gros sur la pomme et pourraient s’être métamorphosées en arbres pour toujours. A tout poète, à chaque Cité, la nécessité de son récit.

Les Hespérides avaient parmi divers surnoms celui d’«Ephimeron aeidousas » : cantatrices, tant elles chantaient bien, comme certains oiseaux à la tombée de la nuit. Elles ont parfois été associées, voire confondues avec les Atlandides  les Hyades ou les Pléiades, toutes filles d’Atlas…  Quant aux pommes d’or… il se peut que ce fussent des oranges. Plus probablement des coings. Mais on n’est jamais sûr… il se pourrait que ce fussent en fait des brebis appelées mêla, c’est-à-dire pomme en grec, à la toison dorée. Décidément, une mère n’y retrouverait pas ses petits.