Ceci n’est pas un smiley

15.06.2015
Christian Morgenstern - Fisches Nachtgesang

Christian Morgenstern - Fisches Nachtgesang

Ni un smiley et même pas un emoticon : ceci est un poème. Ecrit par Christian Morgenstern, dont le tître est Fisches Nachtgesang : le chant nocturne du poisson.

C’est même un calligramme. Cet exemple peu parlant en dit long.

L’étiquette de la bougie à senteur de cyprès est aussi un calligramme. En quelques lettres, la forme conique de l’arbre y est reproduite de façon stylisée.
Sa composition était un hommage à la passion de Desmond Knox-Leet pour la calligraphie, la cryptographie, les signes écrits, les langues, et l’art pictural : il travailla comme traducteur et cryptographe pendant la guerre et devint peintre. Il créa toutes les étiquettes et écritures diptyque jusqu’à sa mort, en 1993.

Le calligramme est un poème dont la disposition des vers ou des mots dessine un sujet qui illustre généralement le thème du texte. Le mot fut inventé par le poète français Guillaume Apollinaire (1880 – 1918). Ses calligrammes firent le tour du monde : sa tour Eiffel bien sûr, empreinte des animosités d’alors, sa passion blessée pour Lou, mais aussi son bestiaire.
Les calligrammes existaient bien avant lui. Les plus anciens connus sont du poète grec Simmias de Rhodes (IVe siècle avant JC), ci-dessous Pteryges (Les ailes).

Mais lorsque nait l’art moderne, le calligramme veut devenir un acte poétique et non plus seulement un jeu d’illustration. Apollinaire cherche « une synthèse des arts, de la musique, de la peinture, de la littérature ». C’est ainsi qu’il faut lire ce Fisches Nachtgesang de Christian Morgenstern en couverture : comme un acte de poésie concrète et spatiale. Ce même élan bouleversera plus tard la musique : ce sera la musique concrète et ses hybridations, portées en France par Pierre Schaeffer et Pierre Henry, qui inspireront Karlheinz Stockhausen dont les trois fondateurs de diptyque ne manquaient aucun de ses concerts parisiens. Comme texte et images, tout se tient.